L'artisanat un secteur économique à part
05/01/2018
L’artisanat aujourd’hui en quelques chiffres
Au premier janvier 2014, on recensait 1 223 615 entreprises artisanales, en croissance de 11,3% sur un an avec une part de 32,3% de part de marché dans le secteur marchand (hors agriculture, finance et assurance).
Le nombre d’actifs en 2013 atteint 2 163 200 salariés et 909 900 non salariés. Le salaire annuel moyen des indépendants (hors auto entrepreneurs) est de 23 300€ soit un peu moins de 2000€ par mois (rappel en comparaison selon l’Insee, le salaire mensuel pour un salarié dans le secteur privé ou public : 2957€ brut en 2014)
Les entreprises artisanales se caractérisent par leur dimension et la nature de leur activité à taille humaine. Elles emploient, dans leur majorité, moins de 10 salariés dont les acteurs sont souvent des indépendants qui assurent, seuls ou avec leur conjoint, la responsabilité de l’entreprise. Ils doivent exercer une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de service répertoriée dans le répertoire des métiers.
Une entreprise sur deux (51,4%) est sous le régime de l’entreprise individuelle. Ce statut peut vite devenir anxiogène et être générateur de stress pour les artisans. Dans les faits, le fondateur ne possède qu’un seul patrimoine. Avantage : il ne risque pas d’avoir d’abus de biens sociaux et ne nécessite pas de capital social. Sa création est assez simple car elle ne nécessite pas de statut excepté de devoir déposer un simple dossier auprès du Centre de Formalités des Entreprises (CFE). Elle bénéficie enfin d’un régime fiscal assoupli. En revanche côté mauvaises nouvelles, n’ayant qu’un seul patrimoine, l’entrepreneur engage sa responsabilité personnelle dans le cas où il commet des infractions dans le cadre de la mise en œuvre de ses activités professionnelles.
Il demeure donc responsable personnellement pour les créances contractées au nom et pour le compte de son entreprise. Ce caractère illimité de la responsabilité de l’entrepreneur peut compromettre gravement son patrimoine personnel. En cas de dépôt de bilan, les conséquences sur son patrimoine privé et sa vie personnelle peuvent vite devenir insupportables. Du point de vue social, le régime de couverture de l’entrepreneur individuel ne lui permet pas de profiter d’une profession sécurisée. En cas de faillite, il ne bénéficie pas des couvertures procurées par l’assurance-chômage du régime général.
En conclusion, l’entreprise individuelle demeure la société la plus facile à concevoir, toutefois, elle ne peut pas forcément correspondre à tous les projets. C’est la raison pour laquelle il convient d’établir une étude sérieuse pour déterminer la forme juridique adaptée à sa future entreprise et malheureusement un trop grand nombre d’artisans ne prennent pas en considération ces éléments qui peuvent être lourds de conséquences en cas de difficultés.
Autre phénomène à souligner : la part des auto-entrepreneurs dans le nombre de créations des entreprises artisanales. En 20141 ils représentent 50% de la totalité (181 000 créations) avec une croissance de 8%. Statut à part qui n’exige pas les mêmes contraintes que l’entreprise individuelle : pas d’obligation de tenir une comptabilité et pas de TVA. Ceci entraine parfois des tensions en matière d’équité avec les artisans qui eux sont assujettis à beaucoup plus de contraintes.
Quels sont les origines de l'artisanat ?
Si on voulait remonter au temps de la Grèce antique, il faudrait revoir ses classiques avec Héphaïstos, dieu du feu et des forgerons. Fils d’Era, épouse de Zeus, cette dernière le jeta, du haut de l’Olympe, dans la mer le trouvant trop laid. Recueilli et élevé pendant 9 ans par Thétis (nymphe marine) il deviendra un artisan et un inventeur divin en façonnant des bijoux et finira par épouser Aphrodite.
Depuis, le travail manuel est synonyme d’une belle époque où les anciens savaient prendre le temps de vivre tout en pensant différemment la notion de travail. L’artisan jouissait dans son ensemble d’un statut et d’une respectabilité bien différents de ceux que lui confère notre société dite moderne (en référence au relatif oubli de l’artisanat entre 1950 et 1970).
Les grandes révolutions industrielles marquent le début de la disparition progressive des pratiques et des traditions séculaires qui organisaient le monde du travail et des métiers synonymes de terroir, transmission, tradition, tours de main, coutumes ou amours du bel ouvrage.
Les artisans se définissent aujourd’hui comme des hommes et des femmes de savoir-faire. Qualifiés dans leur métier, ils en sont les dépositaires essentiellement par le biais de l’apprentissage. Ce sont des chefs d'entreprise indépendants qui travaillent dans un esprit d’initiative, d’innovation, à la recherche de la qualité, du respect de l’environnement et de la satisfaction du client.
On peut définir quatre catégories bien distinctes :
1.L’artisan : il est officiellement reconnu comme tel, s'il justifie soit d'un diplôme ou d'un titre homologué dans le métier exercé, soit d'une immatriculation au Répertoire des Métiers pendant au moins six ans.
2.Le maître-artisan : un artisan devient maître-artisan lorsqu'il peut justifier de 10 années d'immatriculation au Répertoire des Métiers, soit lorsqu'il est titulaire du brevet de maîtrise dans le métier exercé après 2 ans de pratique professionnelle.
3.Le maître d'apprentissage : il est reconnu quand il dispose des qualités pédagogiques et des compétences nécessaires pour former les apprentis. Ce titre est délivré par les chambres des métiers et de l'artisanat.
4.L’artisan d'art : ce titre est attribué à l'artisan dont l'activité est répertoriée dans la classification des métiers d'art. Ce titre est délivré par les chambres des métiers et de l'artisanat.
Les entreprises artisanales constituent un poids non négligeable du secteur marchand et à ce titre elles remplissent une fonction sociale en terme de créations d’emplois particulièrement pour les catégories qui ont du mal à trouver un emploi salarié : les jeunes, les femmes, les personnes âgées, les immigrés…
L’artisanat contribue ainsi à la recréation d’un lien social dans les agglomérations urbaines ou dans les campagnes fortement touchées par le chômage. On les retrouve de façon relativement homogène sur l'ensemble du territoire où elles forment un tissu dense d'activités au service de la population, des entreprises et de l'économie locale.
L'artisanat est donc un vecteur de l’équilibre des agglomérations, des villes moyennes et des bourgs, tant par son poids économique que par sa contribution quotidienne à rendre ces quartiers chaleureux et dynamiques.
Pour information :
- 31% des entreprises sont implantées en communes rurales
- 41% dans les unités urbaines de moins de 200 000 habitants
- 28% dans les communes de plus de 200 000 habitants
En conclusion, au-delà de l’image du plombier polonais, du boulanger ou de l’artisan coiffeur au coin de la rue, se cache une multitude de professions qui véhicule des savoir-faire depuis l’antiquité et qui fait partie de notre quotidien. Leur spécificité et leur fonctionnement à l’heure de la mondialisation les rendent vulnérables face à l’explosion des nouveaux modes de consommation comme « l’ubérisation » ou l’achat sur internet.
La vraie question est de savoir si aujourd’hui ils sont capables de s’adapter dans un environnement incertain et d’innover pour assurer la pérennité de leur entreprise.
Benjamin Salles
Sources : chiffres du marché de l’artisanat (direction générale des entreprise, données 2016), www.artisanat.fr,